« DisCoVeRy », « Solidarity », « Hycovid »… Près de 600 essais cliniques sont en cours pour évaluer l’innocuité et l’efficacité de molécules contre le virus SARS-CoV2. L’effort de recherche est international et massif. Il s’appuie notamment sur les travaux qui ont été menés ces dernières années sur d’autres virus.
Covid-19 : deux phases
Le Covid-19 est une maladie marquée par deux phases. La phase précoce est celle de l’infection et de la multiplication du virus. Comme tous les virus, le coronavirus utilise nos cellules comme hôtes pour se reproduire. La phase tardive (autour de J7 à J9) est liée à une réponse inflammatoire excessive avec une augmentation importante des cytokines inflammatoires, ce que l’on appelle « l’orage de cytokines ».
Antipaludiques et antiviraux pour la phase précoce
Actuellement, plusieurs molécules ciblant l’entrée ou la réplication du virus sont testées dans des essais cliniques de grande envergure :
L’essai européen « DisCoVeRy », porté par l’INSERM, étudie depuis le 22 mars l’efficacité de quatre molécules, déjà connues pour la plupart dans le traitement d’autres maladies :
- l’Hydroxychloroquine, prescrite habituellement contre le paludisme et certaines affections rhumatologiques, empêchait le virus de pénétrer les cellules hôtes.
- le Remdesivir, un antiviral notamment utilisé contre la maladie à virus Ebola, bloquerait la réplication du virus.
- une combinaison Lopinavir/Ritonavir (Kaletra), utilisée dans le traitement du virus de l’immunodéficience humaine (VIH), bloquerait la réplication du virus.
- une combinaison Lopinavir/Ritonavir + interféron bêta. L’interféron est connu pour stimuler la défense de l’organisme.
Un autre essai international similaire, baptisé « Solidarity », a été lancé le 20 mars par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Pour l’heure, aucun résultat officiel n’a été communiqué, même si, ceux obtenus par le Remdesivir semblent potentiels, selon une vaste étude menée par les instituts nationaux de santé américains (National Institutes of Health). Ainsi, les États-Unis ont autorisé sa prescription en urgence depuis le 2 mai.
Par ailleurs, en France, l’Hydroxychloroquine a été intégrée dans d’autres essais cliniques, dont :
- « Hycovid », lancée par le CHU d’Angers, cette étude évalue l’efficacité de cette molécule seule chez 1 300 malades atteints de formes de Covid-19 moins graves que ceux inclus dans l’étude « DisCoVeRy ». La date estimée d’obtention des résultats n’étant pas connue.
- « COVIDOC », portée par le CHU de Montpellier, l’étude compare une combinaison Hydroxychloroquine-Azithromycine avec une combinaison Hydroxychloroquine-placebo.
- « PrEP-COVID », évalue l’impact de l’Hydroxychloroquine et de l’Azithromycine sur la prévention de la contamination par le virus SARS-CoV-2 chez les personnels hospitaliers de l’AP-HP (Assistance Publique-Hôpitaux de Paris) à 40 jours de traitement.
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Les immunomodulateurs contre l’orage de cytokines
Au stade avancé de la maladie, l’une des causes d’aggravation des cas est le phénomène « d’orage de cytokines ».
Les cytokines sont des substances naturellement produites par les cellules du système immunitaire. Cet ensemble de protéines est produit en particulier pour favoriser la réaction inflammatoire, qui est une réponse naturelle de défense d’un organisme agressé. Mais dans le cas de « l’orage cytokinique », il est observé un emballement de ce système immunitaire menant à des réactions inflammatoires excessives. Cela entraîne l’accumulation de débris et de fluides dans les alvéoles et l’épaississement du tissu interstitiel, empêchant ainsi l’oxygénation du sang. A ce stade, les patients souffrent de détresse respiratoire aigüe nécessitant des soins de réanimation.
Pour contrer cette tempête de cytokines, des immunomodulateurs sont actuellement testés dans des essais cliniques dont l’étude « CORIMUNO-19 », portée par l’AP-HP.
Un des essais, « CORIMUNO-TOCI » livre ses premiers résultats et ils semblent encourageants. L’utilisation du Tocilizumab chez des patients Covid-19 avec pneumonie moyenne ou sévère a apporté une amélioration du pronostic de ces patients. Ces résultats devraient être confirmés de manière indépendante par des essais supplémentaires.
Le Tocilizumab est un anticorps monoclonal qui bloque le récepteur de la cytokine interleukine-6 (IL-6), l’une de ces fameuses protéines du système immunitaire jouant un rôle dans le processus inflammatoire et que l’on pense impliquée dans les « orages cytokiniques ». Le Tocilizumab est notamment utilisé dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde.
D’autres essais « CORIMUNO-19 » actuellement en cours d’analyse, testant d’autres inhibiteurs des récepteurs de l’IL-6 tels que le Sarilumab (utilisé dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde) et d’autres immunomodulateurs tels que : le Nivolumab (utilisé dans le traitement de cancers), l’Eculizumab (utilisé dans le traitement de l’hémoglobinurie paroxystique nocturne).
D’autres pistes de traitement contre l’inflammation excessive des formes graves de Covid-19 sont également lancées : un essai (« STROMA-CoV2 ») teste si l’injection de certaines cellules souches issues de cordon ombilical, permet de réduire les lésions dans les poumons des patients avec un syndrome de détresse respiratoire aigüe.
Ces essais sont loin d’être les seuls. La plateforme ClinicalTrial.gov. qui inventorie l’ensemble des études cliniques dans le monde, recense plus de 250 essais de phase III relatifs au Covid-19. Et la liste s’allonge chaque jour. Pour la plupart, ces essais testent les mêmes familles de molécules.
Transfert de plasma de patients Covid-19 guéris
Injecter du plasma – la partie liquide du sang qui contient notamment des anticorps – de personnes guéries du Covid-19 à des malades : c’est l’idée de l’essai clinique « Coviplasm » lancé par l’AP-HP le 7 avril et dont les résultats sont attendus ce début du mois de mai.
L’objectif est de renforcer les défenses immunitaires des malades pour lutter contre le virus. Deux essais menés en Chine, dont les résultats ont déjà été publiés*, démontrent un effet bénéfique, avec une diminution des symptômes.
*Duan K et al. PNAS 2020 ; Shen C et al. JAMA 2020
Vaccin contre le SARS-CoV2 : où en est la recherche ?
Selon l’OMS qui publie une liste des vaccins candidats, 94 ont prouvé leur efficacité in vitro et sont en phase préclinique (testés chez des animaux). Huit d’entre eux sont déjà au stade clinique de phase 1/2 et sont testés chez des volontaires. Les chercheurs étudient différentes technologies, dont certaines n’ont pas été utilisées auparavant dans d’autres vaccins.