Présentation de la maladie
En résumé
La protéinose alvéolaire pulmonaire (PAP) est une maladie rare caractérisée par l’accumulation de matériel anormal dérivé du surfactant dans les alvéoles pulmonaires. Le surfactant est une substance riche en graisses et en protéines tapissant l’intérieur des alvéoles pulmonaires et qui est indispensable à la respiration normale. Il existe naturellement un cycle continu de sécrétion et d’élimination du surfactant dans les alvéoles. Dans le cas de la protéinose alvéolaire pulmonaire, l’élimination du surfactant par les macrophages (globules blancs) alvéolaires est altérée. Cela entraîne une accumulation du surfactant dans les alvéoles pulmonaires gênant ainsi les échanges gazeux : transfert de l’oxygène de l’intérieur de l’alvéole vers le sang et du gaz carbonique du sang vers l’intérieur de l’alvéole. La protéinose alvéolaire pulmonaire peut évoluer, se maintenir stable ou s’améliorer spontanément.
Personnes concernées
La prévalence de la protéinose alvéolaire pulmonaire est estimée à au moins 7 cas par million d’habitants.
Elle touche les hommes, les femmes et les enfants de tous âges, quel que soit leur statut socioéconomique, bien qu’elle soit plus fréquente chez les hommes adultes de plus de 50 ans et les fumeurs.
Les formes auto-immunes sont les plus fréquentes. Elles représentent environ 90 % des protéinoses alvéolaires pulmonaires et se manifestent essentiellement chez l’adulte.
Causes
La protéinose alvéolaire pulmonaire est séparée en trois groupes en fonction de sa cause :
- Les protéinose alvéolaires pulmonaires auto-immunes caractérisées par la présence dans le sang d’anticorps dirigés contre le GM-CSF (facteur de stimulation de colonies de macrophages -granulocytes). Le GM-CSF est une molécule nécessaire au fonctionnement normal de certains globules blancs et en particulier des macrophages du poumon. Ces anticorps vont empêcher la fonction normale du GM-CSF et conduire à des anomalies de fonctionnement des macrophages dont un des rôles physiologiques est de recycler le surfactant dans les alvéoles pulmonaires.
- Les protéinoses alvéolaires pulmonaires génétiques liées à des mutations dans différents gènes dont ceux qui permettent la fabrication du récepteur au GM-CSF (CSF2RA et CSF2RB) et le gène MARS responsable de la fabrication de l’ARNt synthétase de la méthionine.
- Les protéinoses alvéolaires pulmonaires secondaires à une maladie sous-jacente, le plus souvent hématologique, mais aussi à l’inhalation de toxiques et à des infections.
Il faut noter que l’on utilise parfois le terme de protéinose alvéolaire pour désigner un certain degré d’accumulation de matériel dérivé du surfactant dans les alvéoles pulmonaires dans les situations d’anomalies de production du surfactant par mutations des gènes : SFTPB (protéine B du surfactant), SFTPC (protéine C du surfactant), ABCA3 (transporte les protéines SP-B et SP-C dans la cellule) ou NKX2-1 (stimule la production de SP-B et SP-C).
Symptômes
Les symptômes de protéinose alvéolaire pulmonaire ne sont pas spécifiques et ne sont présents que chez deux tiers des patients. L’essoufflement (dyspnée) progressif surtout à l’effort, est le symptôme le plus fréquemment rencontré, suivi de la toux chronique et de l’expectoration chronique. D’autres symptômes peuvent être présents : une déformation caractéristique des doigts, appelée hippocratisme digital (les doigts prennent un aspect en « baguettes de tambour » et les ongles se bombent) et des râles crépitants. Le diagnostic de protéinose alvéolaire pulmonaire peut être également réalisé au cours d’une complication infectieuse avec fièvre et/ou altération de l’état général.
Diagnostic
Pour diagnostiquer une protéinose alvéolaire pulmonaire, plusieurs examens sont réalisés. La détection de cette maladie repose en particulier sur la réalisation d’un scanner thoracique, qui permet de mettre en évidence certaines anomalies évocatrices de protéinose alvéolaire pulmonaire.
Si le scanner fait évoquer l’existence de cette maladie, un lavage broncho-alvéolaire (LBA) est pratiqué pour confirmer le diagnostic. Le LBA se fait au cours d’une endoscopie bronchique, le plus souvent réalisée sous anesthésie locale. Le LBA consiste à instiller du sérum physiologique au niveau des bronches puis à le ré-aspirer pour l’analyser au laboratoire. Dans la protéinose alvéolaire pulmonaire, le LBA est typiquement de couleur laiteuse (car il est riche en protéines et en graisses) au lieu d’un aspect transparent.
Exceptionnellement une biopsie pulmonaire chirurgicale ou une cryobiopsie peut être nécessaire pour confirmer le diagnostic histologiquement.
Le dosage des auto-anticorps anti-GM-CSF dans le sérum peut être réalisé pour en affirmer la cause auto-immune.
Dans les formes génétiques, le diagnostic est fait à partir d’un prélèvement sanguin à la recherche des mutations dans les gènes cités ci-dessus.
Évolution
L’évolution de la protéinose alvéolaire pulmonaire auto-immune est imprévisible. Environ un tiers des patients voient leur état s’améliorer spontanément, mais il peut se dégrader dans un deuxième temps. Il a été suggéré que l’éviction de certains aérocontaminants tels que le tabac ou les poussières joue un rôle dans cette amélioration. Les infections secondaires à des germes (bactéries ou champignons) représentent une complication possible. Un bilan bactériologique est réalisé systématiquement lors des LBA. La protéinose alvéolaire pulmonaire peut dans de rares cas, évoluer vers une fibrose pulmonaire. Dans les formes génétiques qui débutent en général dans l’enfance, l’évolution est difficilement prévisible et peut être sévère.
Prise en charge
Au cours des dernières années, des progrès significatifs ont été accomplis dans le développement de traitements permettant la prise en charge de la protéinose alvéolaire pulmonaire, avec l’objectif d’améliorer les symptômes, la tolérance à l’effort, et la qualité de vie.
Le traitement de référence de la protéinose alvéolaire pulmonaire est symptomatique et consiste à laver les poumons avec de grands volumes de sérum physiologique afin d’éliminer le surfactant accumulé. Cette procédure est appelée un « lavage thérapeutique » (ou « whole lung lavage » – WLL). Ce traitement est réalisé au cours d’une anesthésie générale avec intubation sélective de chaque poumon, et doit être répété plusieurs fois chez plus de la moitié des patients.
Une évolution récente de la prise en charge permet désormais de proposer une supplémentation en GM-CSF par voie inhalée. Cette alternative thérapeutique est validée et peut être indiquée en 1ère intention tout comme les lavages pulmonaires thérapeutiques.
Un traitement basé sur l’administration intraveineuse de rituximab est actuellement positionné en troisième option thérapeutique, lorsque les lavages pulmonaires et la supplémentation en GM-CSF n’ont pas donné de résultats satisfaisants. Cette prise en charge se fait après avis d’un centre spécialisé dans les maladies pulmonaires rares.
En cas d’échec des traitements précédents (lavages pulmonaires, GM-CSF et rituximab), des échanges plasmatiques peuvent être proposés, après avis d’un centre spécialisé dans les maladies pulmonaires rares. Cette procédure, également appelée plasmaphérèses, repose sur un principe de prélèvement et transfusion sanguine combiné. Elle consiste à retirer une partie du plasma — la composante liquide du sang — et à le remplacer, dans le but d’éliminer certaines substances impliquées dans la maladie.
Dans les formes génétiques, le traitement symptomatique de première intention est le lavage thérapeutique. Plus spécifiquement, dans les PAP associées à une mutation MARS1, la supplémentation en méthionine est considérée comme le traitement de référence.
Enfin, la transplantation pulmonaire peut également être discutée dans certains cas.
Relecture par le Pr Stéphane Jouneau, médecin coordonnateur du centre de référence constitutif maladies pulmonaires rares (OrphaLung) de Rennes, CHU de Rennes, Hôpital Pontchaillou– mise à jour juillet 2025
1. Trapnell BC, Nakata K, Bonella F, Campo I, and al. Pulmonary alveolar proteinosis. Nat Rev Dis Primers. 2019 ;5(1):16.